Quelques réflexions sur l'œuvre d'art à l'époque de la reproductibilité technique
Comme le rappelle Walter Benjamin, théoricien marxiste du XXe siècle: « Il est du principe de l’oeuvre d’art d’avoir toujours été reproductible. Ce que des hommes avaient fait, d’autres pouvaient toujours le refaire (1). » En effet si l’auteur souligne que la question de la reproduction des œuvres d'art est immémorielle, elle est d’autant plus prégnante lorsqu’elle est ramenée à des considérations capitalistes dans le contexte qui lui est contemporain avec l’essor de la marchandisation culturelle. Si c’est en effet la lithographie qui selon lui a permis de créer d’une certaine manière un marché de diffusion de l’art, la photographie et plus tard le cinématographe auraient en quelque sorte déplacés le rapport artisanal que pouvait entretenir l’artiste avec sa création et l’ont ouvert à des questionnements inhérents sur sa médiatisation avec la nature de sa reproductibilité en tant que même et indéfiniment identique (2) . En revenant ainsi sur les arguments avancés par l’auteur et en les mettant en perspective d’oeuvres sérielles plurielles, nous tenterons d’explorer dans quelle mesure la sérialité dans l’art pourrait être considérée comme une polarité ontologiquement trouble, oscillant entre ambivalence et ambiguïté. Pour répondre à cette problématique, nous reviendrons dans un premier temps à travers le cas de la peinture sur le processus de sérialité analogique comme facteur de singularité et de réalisme de l’oeuvre d’art afin de comprendre les craintes de Benjamin à l’égard de la reproductibilité technique. Dans un second temps, nous tenterons au travers du cas de la photographie et de la cinématographie de démontrer en quoi, bien au contraire, la reproductibilité mécanique peut agir comme processus réflexif artistique.